Nous profitons de nos derniers kilomètres sur la route asphaltée jusqu’à la petite ville de Trevelin où nous faisons un saut de plusieurs milliers de kilomètres au Pays de Galles : ici, panneaux bilingues espagnol/gallois, casa de té (salon de thé). Au début du siècle, les colons implantés dans cette région étaient gallois et ils ont conservé certaines de leurs traditions.
Le Chili est situé à une cinquantaine de kilomètres et le stress est au maxi au passage de frontière car les douaniers chiliens sont très pointilleux sur les denrées alimentaires : en particuliers, pas de fruits secs et nous en avons… Nous retournons le problème dans tout les sens et espérons l’absence de chiens renifleurs dans ce petit poste frontière. Nous en ressortons avec nos abricots, nos raisins et noix de cajou, le préposé aux questions sanitaires n’ayant pas le temps de fouiller l’intégralité des bagages et véhicules de tous. Au premier camping, nous faisons la connaissance d’un adorable couple Franco chilien, Céline et Mickael, avec lequel nous roulons pendant deux jours jusqu’à la carretera austral : ils remontent, nous descendons… D’emblée, avec ce type de rencontre, nous nous disons que ce pays va nous plaire.
Nous sommes particulièrement touchées par la petite ville de Villa Santa Lucia, victime d’un éboulement de terrain qui a fait 50 morts. Les traces en sont encore visibles car nombres de maisons sont amoncelées les unes sur les autres.
La Patagonie est une région très peu peuplée et nous allons régulièrement rouler une centaine de kilomètres sans voir de ville. Au début de la route, nous craignions qu’elle ne soit monotone : nous avions imaginé le paysage similaire du début à la fin, or, nous traversons paysages de montagne, verts pâturages, sous bois, lacs sous le soleil, sous la pluie… Au printemps, les mises bas ont eu lieu et les vaches, moutons, biquettes, juments se déplacent avec leurs petits.
Nous emmagasinons au maximum ces moments de tranquillité et de plénitude apportés par les grands espaces. Les bivouacs en Patagonie sont particulièrement somptueux et faciles à trouver ainsi que l’eau qui jaillit des cascades. Donc aucune crainte pour se ravitailler sur la route et la possibilité de se laver régulièrement malgré la température de l’eau. Nous essayons d’en profiter car conscientes que nous avons beaucoup de chance d’être là. D’autant que l’environnement, l’ambiance et les paysages nous invitent vraiment à prendre notre temps ainsi que les chemins de terre qui nous empêchent de rouler vite. Ici, le terme « ripio » signifiant gravier sur la route, est sur toutes les lèvres. Nous nous dépêcherons quand le paysage monotone de pampa reprendra. Les journées sont souvent fatigantes car rouler sur des chemins obligent une concentration constante et les Patagons ne connaissent pas le plat sauf à de rares occasions. La Patagonie restera un grand moment du voyage : nous nous sentons vraiment au bout du monde, eh, non, ce n’est peut être pas le Finistère… La route a été construite au début des années 80 et est arrivée à Villa O Higgins, dernière ville dans les années 2000. Caleta Tortel, la petite ville aux passerelles sur les photos, était complètement inaccessible sauf en bateau et en avion jusqu’en 2003. Les habitants mettaient entre trois et quatre heures à rejoindre la route en bateau contre 45 minutes aujourd’hui en voiture. Nous appréhendons différemment le rapport à la route que nous avions plus intégré comme un poison pour les riverains, comme ces familles vivant proches des routes très passantes. Ici, pour certains, l’arrivée de la route bitumée se fait attendre et est souvent vécue comme un signe de reconnaissance ainsi que l’implantation de panneaux photovoltaïques pour l’alimentation en électricité des maisons très isolées.
Plus Villa O Higghin approche et moins nous voyons de voiture et camion, l’avant dernier jour, nous en comptons 10. Nous voyons plus de vaches et moutons que d’humains. Cette proportion amène des dialogues un peu loufoques type : « attention Gwen, mets toi de mon côté de la route, il y a un cheval qui te suit » « Ah, ben, oui, je trouvais aussi que mon vélo faisait un bruit bizarre ». Dans ces contrées, nous prenons conscience de la densité complètement folle de notre pays et de certains pays Européens. Un guide rencontré par hasard nous dit en rigolant que nous devrions faire un échange de population entre Europe et Amérique du Sud, les populations seraient sûrement mieux réparties. Nous voyageons deux jours avec Louise et Duncan cyclotouristes écossais avec lesquels nous passons de bons moments et que nous continuons à croiser sans cesse. Villa O Higghins est non seulement la fin de la route après 1100 kilomètres mais également le passage obligé pour la frontière avec l’Argentine pour rejoindre les grands parcs de randonnées. Nous restons coincées trois jours à Villa O Higghins, dans un premier temps, car il y a seulement trois ferry par semaine puis car le temps venteux ne permet pas une sortie des bateaux. Nous n’irons pas voir le glacier du même nom toujours pour des raisons climatiques. Comme nous avons du mal à apprendre à nous reposer, nous faisons des balades aux alentours. Cette ambiance d’attente est assez étrange car nous sommes tous là à attendre la même chose : partir, et à la fois nous sommes plutôt bien car les parties communes du camping sont fort agréables. Et finalement, nous ne savons plus vraiment ce qu’on attend. Nous commençons à voir beaucoup de cyclotouristes, d’autant que chaque nouvel arrivé est coincé à cause des intempéries et une dizaine de vélos prendra place dans le ferry. Le Chili fait parti des pays où même si bien sûr nous avons conscience de la force de la nature (la force du vent, les glissements de terrain, les tremblements de terre), ici, nous y sommes confrontées directement.
Ce pays est le seul lieu où nous sommes restées coincées dans un lieu de bivouac une journée entière sous la tente sans pouvoir sortir à cause de la pluie battante. Au bout d’un jour, nous aurions été prêtes à faire n’importe quoi pour que la pluie cesse enfin. Et, elle a cessé.
Nous vous avons sûrement déjà parlé des sacs plastiques en Amérique du Sud : le Chili est le premier pays à interdire les sacs plastiques dans les magasins et s’en enorgueillit.
Nous rencontrons peu de chiliens car nous bivouaquons beaucoup et heureusement car le niveau de vie du Chili est très cher et donc l’hébergement également. Les chiliens parlent souvent de la cherté de la vie et regrettent la privatisation de la majorité des services dans leur pays et continuent à en vouloir à Pinochet. Pour la première fois du voyage, les habitants ne parlent plus incessamment des problèmes de sécurité et au contraire décrivent leur contrée comme très tranquille : ils sortent en laissant les clefs sur la porte de la maison… Nous mêmes, nous nous surprenons à faire des courses dans les boutiques en laissant nos vélos dehors sans boucler les antivols. Cela nous fait un bien fou…
Nous venons d’arriver en Argentine dans la ville de El Chaten après un passage de frontière éprouvant et long : un départ du camping de Villa O Higghins, la nuit à 4 heures du matin pour prendre un ferry à 6 h00 puis un chemin en côte pendant 6 km enfin un peu de plat pour se reposer et clou du clou un chemin de randonnée de 6 km où il faut porter les vélos, franchir des ruisseaux voire des rivières, tout cela pour manquer l’un des deux ferrys de la journée à 15 minutes prêt. D’autant plus rageant que le lendemain le ferry du matin est annulé pour cause de vent. En bref, nous avons mis deux jours à passer la frontière, un record. El Chaten est donc la bienvenue d’autant que j’ai cassé mon cable de dérailleur sur le chemin de randonnée et qu’il me faut donc le changer. El Chaten est aussi synonyme de retour à la route asphaltée pour plusieurs centaines de kilomètres.
Nous espérons que vous allez bien. Les prochaines nouvelles toujours de Patagonie mais Argentine cette fois ci ou nous logeons avec deux très sympathiques amies australiennes rencontrée à Villa O Higgins, Lee et Pip, qui nous accueillent gentiment dans leur bungalow.
Nouveau blog cadeau innatendu – car proche du précédent – lu à l’instant avec Jeanne…. cette dernière vous dit que le dialogue l’a fait bien rire ! Moi je vous dis « chapeau » car vous sortez avec brio des aventures les plus incroyables. Des bisettes de la région parisienne grise froide voire neigeuse. Demain il y aura un quadra tout neuf.
Hello les filles et bonne fête ma Cathy ! Encore merci pour ce récit, c’est toujours un réel plaisir de vous lire. Vous me faites rêver…. La Patagonie m’a toujours attirée et je suis d’y aller un jour.
Je vous embrasse fort et bonne continuation.
Gros Muxu les filles
Coucou Kale,
on espere de tout cœur que tu découvres la Paragonie qui nous a tant impressionnées.
Muxu, a bientot.
C’est vrai que la toilette matinale semble fraiche. Le glacier suspendu, quel beauté !
Et vous les filles vous semblez super affûtées. Quel voyage !
Pour info le 10 décembre Thalassa diffuse un reportage sur les baleines de la péninsule Valdes.
Bises venteuses.
Coucou,
on se régale particulièrement les yeux et on se sent plutot en forme. Nous venons d’arriver à Ushuaia et on ne réalise pas encore. Nous avons eu un retour du Thalassa par nos parents respectifs. Bon vent comme dirait un certain !
Bises à vous trois.